Ouvrage

C'était le Ray, une ville, un stade

Regarder de vieilles pierres pour cerner l'âme d'un peuple. Echanger avec toutes ses composantes pour en tirer l'essence. Docteur en histoire (Paris-IV Sorbonne) né dans la plus belle ville du monde, chercheur associé au CNRS, professeur de métier, Thierry Camous (45 ans) reste un passionné de Nice, du Gym et du ballon. Attaché au Raï comme à un vieil ami et fidèle supporter, il s'est penché sur ses 86 années d'Histoire pour en tirer un ouvrage fascinant : « Le Ray, une ville, un stade ». Interviews des acteurs du passé et du présent, de l'ombre ou de la lumière, anecdotes croustillantes, sombres heures : plongez en plein coeur d'un morceau de patrimoine local. Et un peu plus que ça...

Pourquoi avoir choisi le Ray comme héros de votre livre ?
Parce qu'à titre personnel, c'est là où j'ai découvert le foot, à la fin des années 80. Comme beaucoup de Niçois, j'y ai été ado, puis j'ai grandi avec. J'ai changé de tribune, on l'a vu évoluer, lui aussi nous a vus grandir. Le Ray était un endroit particulier. Un stade en pleine ville avec une identité populaire, où toutes les classes sociales et tous les quartiers se mélangeaient, sans distinction, des banquiers aux ouvriers.

Comment a germé l'idée d'un tel travail ?
De par ma profession, j'ai toujours écrit, principalement des textes scientifiques laissant peu de place à l'émotion. Et puis le Ray s'est imposé comme un sujet évident. Rédiger un livre permettant de véhiculer une certaine nostalgie me paraissait capital. Mais la nostalgie ne doit pas entraver le présent, au contraire, elle est indispensable pour la construction du club et pour l'avenir.

Pourquoi le Léo-Lagrange vous prend-il, comme beaucoup de Niçois, directement aux tripes ?
Le stade, c'est une coquille. Mais à l'intérieur, une culture s'y développe. Même si le mot peut paraître fort, c'est vraiment ça. Une culture se forge quand on partage le même langage, des souvenirs communs, joyeux ou tristes... Le Ray, c'est une « micro-culture » à lui seul, morceau et partie prenante du patrimoine.

C'est aussi le Gym...
Oui, même si j'ai essayé de me focaliser sur le stade. C'est pour cela que j'évoque aussi un peu l'escrime ou le rugby. Mais évidemment, le Ray, c'est l'OGC Nice. Le club reste toujours en filigrane, il est partout. Et comme le Ray est aussi Nice, le Gym, par conséquent, c'est Nice. Tout est lié. Et le Gym est éternel, il continuera, à travers le temps et les époques, à porter la mémoire de ce stade qui, en 86 ans, incarne tous les âges et toutes les générations. Il est le témoin de toute l'histoire, l'endroit où le club a tout construit, et où, en tant que supporter, tout a été vécu, les sombres heures comme les bons moments.

"C'est comme quand on repasse devant son petit studio... "

Que ressentez-vous quand vous repassez devant ?
C'est comme quand on est un jeune couple, qu'on aménage dans un petit studio. Le temps passe, et si tout va bien, on le quitte pour un logement un peu plus grand. Au fil des années, même si on s'installe dans une grande villa et que c'est mieux, la tendresse pour le petit studio reste toujours présente. C'est là où tout a commencé.

Son esprit se retrouve-t-il à l'Allianz ?
Je le crois. Même s'il y a de nouveaux publics, les supporters l'ont amené. D'ailleurs, il ne disparaitra jamais, certains chants y font encore allusion. Et même les joueurs qui ont connu le basculement d'un stade à l'autre en avaient conscience. La phrase de Romain Genevois, à la page 150, m'a particulièrement marqué. « Le Ray, avec son identité et son histoire, ce n'était pas évident d'en partir, il fallait en quelque sorte amener avec nous tout ce vécu. »  Oui, il fallait emporter son esprit. Pour moi, ça a été fait.

Y a-t-il une personne, parmi toutes celles que vous avez interrogées, qui vous a marqué ?
C'est difficile d'en ressortir une, car chacune a son histoire, ses anecdotes. Ce serait injuste de les nommer, car j'en oublierai. Jean-Philippe Mattio, José Boetto qui nous a quittés cette année, Gilles Chevallier, tous les gens de la Brigade... tout le monde mériterait d'être mentionné.

Avez-vous un souvenir précis de vos années passées en tribunes ?
S'il ne fallait en sortir qu'un, je dirais le barrage contre Strasbourg (victoire 6-0, le 29 mai 1990). Mais c'est très générationnel. J'étais en Sud, sur le côté. Je me souviens des montées de Roby au grillage et de l'ambiance. C'était hallucinant. Sur les buts, mon corps et mes pieds ne touchaient plus terre, tout était emporté par la foule et tu ne pouvais rien faire. C'était magnifique. Il y aurait beaucoup d'anecdotes à raconter, et pas que des bonnes. J'en parle aussi dans le livre, car il y a aussi eu des moments vraiment compliqués, même si avec le temps, on a tendance à ne retenir que ce qui est beau.

Si vous aviez un mot à dire au vieux Raï ?
Ciao baraka !

C.D.

Venez à la rencontre de Thierry Camous ce jeudi soir. L'auteur se rendra au Café des Aiglons à partir de 19h30, soit une heure et demie avant le coup d'envoi d'un match capital d'Europa League entre le Gym et Salzbourg. Par ailleurs des exemplaires de l'ouvrage "C'était le Ray, une ville, un stade" seront à gagner sur OGCNICE.com durant la trêve internationale.